Transhumance Quand les drailles deviennent GR
Un nouvel itinéraire de grande randonnée, le GR®69 La Routo® s’étendant sur 540 km soit 33 étapes successives reliant la plaine de la Crau à la vallée de la Stura en Italie permet sur proposition de la Maison de la transhumance de découvrir la provence et les Alpes par les drailles.
Far la Routo, histoire de la transhumance
De la Provence au Piémont...
Dès le milieu du XVe siècle, les grands transhumants quittaient au printemps les plaines desséchées de Provence pour “faire la route” (far la Routo, en occitan) et gagner, via le col de Larche, les estives de la vallée de la Stura, à la recherche de nouveaux alpages rendus nécessaires par l’accroissement de la taille des troupeaux.
La transhumance a alors créé des liens immuables entre ces territoires et de nombreux éleveurs installés aujourd’hui en Provence sont ainsi originaires des vallées occitanes du Piémont, et notamment de la vallée de la Stura.
Sur les traces des bergers
Le métier de berger est certainement l’un des plus vieux métiers du monde. En Provence, il peut paraître immuable tant sa présence en Crau ou en montagne a imprégné la mémoire des gens.
On retrouve ainsi des traces des bergers mais plus généralement de l’élevage pastoral et transhumant sur l’ensemble des territoires : les bergeries de Crau et de Camargue, les bories dans les collines et massifs de basse altitude, les pierriers (ou clapiers), les canaux d’arrosage (ou bélières), les vestiges de granges et les cabanes pastorales des Alpes du Sud, les gravures de bergers…
Drailles et carraires
La grande transhumance ovine fait partie du patrimoine provençal.
Historiquement, elle a tracé son propre réseau routier, les drailles ou carraires, voies de communication entre la Basse Provence et les montagnes alpines.
« Afin de faciliter la progression du cheptel, ces chemins de transhumance atteignaient jusqu’à cent mètres de largeur et, ne tenant guère compte des dénivelés, étaient autant que possible tracés en ligne droite.
Les itinéraires prenaient de préférence la ligne des crêtes des régions de coteaux et de moyenne montagne, afin d’éviter les vallées et plaines cultivées, les agglomérations où les querelles avec les habitants étaient fréquentes.
Les drailles étaient bornées de pierres plantées par couples, de part et d’autre, tous les quatre ou cinq cent mètres, des tas de pierres délimitant le tracé afin que les troupeaux puissent également les emprunter de nuit. »
P. Fabre – Hommes de la Crau, des coussouls aux alpages (Cheminements Ed., 1997)
Ces anciennes voies ont pour la plupart disparu. De petites portions sont toutefois encore empruntées par les quelques troupeaux qui, depuis le Var, les Alpes-Maritimes ou les Alpes de-Haute-Provence gagnent à pied les proches vallées du Verdon, de l’Ubaye, du Var, de la Vésubie ou de la Tinée.
La transhumance aujourd’hui
La transhumance, du latin trans, « au-delà », et humus, « terre », désigne les déplacements saisonniers de grands troupeaux d’ovins, de bovins, de caprins et d’équins, sur des distances plus ou moins longues. En France, elle demeure une pratique très vivante dans les territoires montagnards et méditerranéens, où elle marque et conditionne, avec une grande diversité de formes, les relations entre les hommes, les animaux et les écosystèmes.
Tout en s’adaptant aux évolutions de la société, les éleveurs ovins ont su conserver le caractère extensif de l’élevage de Provence et des Alpes, dont la clé de voûte reste la valorisation de grands espaces naturels et la pratique de la transhumance.
Un nouvel itinéraire de grande randonnée
La Routo, de l’occitan far la routo, transhumer, est un projet franco-italien ayant pour objectif le développement des territoires autour de la pratique de la transhumance et de l’itinérance touristique. Il est issu de plus de dix ans d’échanges entre la Maison de la transhumance (Salon-de-Provence) et l’Unione Montana Valle Stura (Piémont italien) et vise à la mise en oeuvre et l’animation d’un itinéraire et d’un réseau transfrontaliers reliant la plaine de la Crau à la vallée de la Stura.
L’itinéraire de randonnée La Routo a été défini à partir du cadastre napoléonien à la recherche des anciennes drailles de transhumance entre la Provence et les Alpes. Il retrace ainsi l’itinéraire des troupeaux en partance de la Crau qui suivaient l’ancienne voie Aurélienne jusqu’à Eguilles, empruntaient une draille qui contournait Aix-en-Provence par le nord puis passait au nord de Saint-Marc et de Vauvenargues. Les troupeaux gagnaient ensuite Rians, Quinson, Riez, Puimoisson, Mézel, Digne, La Javie et Seyne, franchissait la crête entre la Blanche de Seyne et l’Ubaye, puis, remontant la vallée à partir de Méolans, conduisait à la Haute Ubaye, ainsi qu’au Piémont par le col de Larche.
Ces anciennes voies ont pour la plupart disparu suite à la culture des sols, au reboisement ou à la création de routes goudronnées. Le GR®69 La Routo® emprunte les portions d’anciennes drailles retrouvées en de nombreux endroits, notamment vers Arles, Eguilles, Vauvenargues, Valensole, Seyne-les-Alpes… Et permet de donner une seconde vie à ces chemins piétons.
Agréé sentier de Grande Randonnée en juin 2020 par la Fédération française de randonnée pédestre, le GR69® La Routo® relie ainsi les plaines de Camargue et de Crau à la vallée de la Stura, permettant de découvrir les différentes dimensions de l’élevage transhumant.
Les randonneurs seront amenés à découvrir en chemin l’ensemble des signes anciens ou actuels liés à l’élevage pastoral. Qu’il s’agisse des nombreux aménagements réalisés pour les troupeaux transhumants (pierres relevées, murets, aires de repos, ponts et fontaines) ou des paysages pastoraux emblématiques façonnés par la dent des brebis.
Quelques exemples de points d’intérêts pastoraux
Entre les étapes 13 et 19 du GR, de Saints Jurs à Seyne-les-Alpes en Provence Alpes Digne les Bains le GR les traces pastorales sont présentent sous différentes formes. Nous en dévoilons quelques une ici :
Le poteau de Telle
(étape 13 du GR)
Au bout du plateau de Valensole, bien connu pour ses champs de lavande, apparaît le poteau de Telle, symbole pour les bergers qui l’aperçoivent de loin, carrefour de la transhumance, représentant le passage du plateau vers les proches montagnes.
Une draille permet alors de descendre droit vers les villages de La Bégude, puis Bras d’Asse ou Estoublon. De rares troupeaux en provenance du Var empruntent encore de nos jours cette draille emblématique.
La draille des troupeaux d’Arles (étape 13 du GR)
Les principales voies de transhumance depuis les plaines de Crau et de Camargue vers les montagnes des Alpes étaient au nombre de quatre. Ces drailles ou carraires dites «générales» avaient de vingt à cent mètres de largeur, nécessaires à la surveillance, à la cadence de marche des grands troupeaux et à leur nourriture.
Celle retenue pour l’itinéraire La Routo reliait Arles à la haute Ubaye puis le Piémont par le Col de Larche (appelé Colle della Maddalena sur le versant italien). Elle était dénommée «carraire des troupeaux d’Arles» ou encore «draye de l’average d’Arles».
L’ancienne draille de Lagremuse
(étape 14 du GR)
Depuis l’abandon de la transhumance à pied à la fin du XIXe, de nombreuses drailles ont disparu sous les cultures, les routes ou les habitations. L’ancienne draille de Lagremuse fait partie des rares que l’on a pu retrouver.
Le lycée agricole et la ferme expérimentale de Carmejane
(étape 14 du GR)
Situé au coeur de la zone préalpine, le lycée agricole de Carmejane accueille près de 200 futurs éleveurs dans un cadre où il fait bon vivre.
Le site de Carmejane héberge également une ferme expérimentale ovine avec un troupeau de 650 brebis de race préalpes du sud.
La ferme de Carmejane est caractéristique des élevages ovins pastoraux : une base cultivable essentiellement consacrée à l’alimentation des troupeaux, des parcours et l’utilisation d’estives. Depuis 2004, le troupeau transhume dans deux proches alpages de la Haute-Bléone et de la vallée de la Blanche. Depuis bientôt 40 ans, la ferme de Carmejane joue ainsi un rôle moteur indispensable dans le développement des systèmes d’élevages pastoraux préalpins.
Exposition « La routo, sur les chemins de la transhumance, 1783-1945 » aux archives départementales
(étape 15 du GR)
Très haut dans l’histoire, la Haute Provence est une terre d’accueil pour les troupeaux transhumants qui viennent y paître. Les «drailles» ou «carraires» sont alors très encombrées : à l’aller au printemps, depuis la basse Provence ; au retour à l’automne, quand les troupeaux quittent les montagnes pastorales.
Jusqu’au 30 septembre 2022, du lundi au vendredi de 9h à 12h et de 13h à 17h. www.archives04.fr
Exposition « Territoire de transhumance » Au musée promenade
(étape 15 du GR)
Cette exposition retrace l’histoire de La Routo et de la transhumance sur le territoire de l’UNESCO Géoparc de Haute Provence. La transhumance et l’élevage transhumant sont un phénomène historique et actuel au coeur de l’UNESCO Géoprac.
www.geoparchauteprovence.com/le-musee-promenade/
L’écomusée «La Javie autrefois »
(étape 16 du GR)
L’écomusée de La Javie présente la vie du village et de la Haute-Bléone autrefois.
Un voyage il y a 100 ans à travers 8 expositions à thème.
Une salle est consacrée à la vie du berger et présente objets, photographies et documents témoignant de leur quotidien à l’époque de la grande transhumance à pied.
Ouvert toute l’année sur rendez-vous téléphonique. 07 85 41 80 69
Relarg au col du Labourer et l’alpage du Blayeul
(étape 16 du GR)
La transhumance à pied était un périple de plusieurs semaines. Le long du voyage, les troupeaux pouvaient faire étape sur des emplacements spéciaux qui jalonnaient les routes pastorales : les relargs. Constitués de terres incultes ou de parties de montagne, les relargs permettaient de se reposer une journée ou une demi-journée, de s’abreuver et de s’alimenter.
L’alpage du Blayeul est valorisé par un groupement pastoral.
Maison du mulet
(étape 18 du GR)
Le mulet était autrefois utilisé pour tirer le charreton lors des grandes transhumances et pour le ravitaillement des cabanes de bergers. La Maison du Mulet vous invite à découvrir son histoire.
Réalisé avec le concours de l’Office du Tourisme Provence Alpes Digne les Bains
