- Par Delphine Daniel
Acheter des animaux, pas des problèmes
Que ce soit quelques nourrissons pour faire téter sous une vache très laitière, quelques brebis pour remplacer des pertes hivernales ou que ce soit un lot conséquent pour augmenter ou créer un troupeau, acheter des animaux n’est jamais anodin. Beaucoup de maladies peuvent apparaître lors de l’achat alors que quelques règles simples permettent d’éviter des catastrophes.
La situation la plus grave est celle d’introduction d’un agent très pathogène dans un troupeau indemne. La gale, la paratuberculose, le CAEV… sont des maladies qui s’achètent.
Si la vérification du statut sanitaire est facilitée en bovin par la mention sur la carte verte, elle est plus compliquée dans les autres espèces.
Le questionnement de l’éleveur, la visite du cheptel donne quelques indications sur la conduite des animaux et le sérieux du vendeur. Les acteurs locaux (techniciens, vétérinaires,…), d’autres éleveurs ayant acheté des animaux dans le même troupeau peuvent également vous renseigner et vous orienter vers les vendeurs sérieux et attachés à la qualité des animaux qu’ils vendent.
L’achat d’animaux isolés ou ayant transité par plusieurs intermédiaires sans transparence reste un achat risqué. Pour être plus sûr du statut du cheptel vendeur vous pouvez faire établir un billet de garantie conventionnel et ainsi permettre plus de transparence dans la négociation.
Si ces mesures prémunissent des maladies très invalidantes, elles ne garantissent pas l’absence de problèmes à l’introduction. Il existe d’autres risques plus sournois. De nombreuses maladies évoluent à bas bruits dans un cheptel : les diarrhées, les pneumonies, les mammites, les boiteries… Toutes ces maladies sont présentes en petit nombre et posent, le plus souvent, peu de problème à l’éleveur et à son troupeau. En effet, la plupart des animaux sont immunisés contre ces agents infectieux peu pathogènes. Ces maladies ne touchent alors que les animaux les plus vulnérables : les meilleures laitières, les vieux animaux, les jeunes issus de primipares, les derniers nés…
Les animaux achetés sont adaptés aux bactéries et virus du troupeau dans lequel ils vivaient. Votre troupeau possède également ses propres bactéries et virus et il y est adapté. Lorsqu’on achète des animaux, on confronte les deux microbismes et les deux immunités. Votre troupeau peut être malade des bactéries et virus amenés, les animaux achetés peuvent être malades à cause des agents infectieux de votre troupeau. Le mélange fait apparaître dans le troupeau non immunisé une épidémie, c’est le troupeau le plus sain qui est le plus touché. Plus on multiplie les origines, plus on multiplie les microbismes et donc les risques d’épidémies. On constate alors une flambée de diarrhées néonatales, d’ecthyma, d’avortements, de boiteries,… dans l’un des deux troupeaux, parfois 2 épidémies évoluent en parallèle une pour chaque troupeau. La situation s’apaise l’année suivant et retrouve son calme la troisième année lorsque microbes et immunité sont revenus à l’équilibre.
Quelques précautions simples évitent ces tracas.
La première est de limiter le nombre de cheptels de souche, ce qui limite la variété des pathogènes. Dans la mesure du possible, acheter des animaux provenant d’1 à 2 origines au maximum.
La suivante est de toujours conserver une pyramide des âges équilibrée, l’achat exclusif de jeunes animaux prédispose à la flambée. Il est toujours intéressant de connaître les maladies rencontrées dans l’élevage du vendeur. Le but n’est pas d’acheter des animaux indemnes de tout (ils tomberaient malades sitôt arrivés en ferme) mais d’en acheter qui ont rencontré les mêmes maladies que celles présentes chez vous. Malgré tout, si le statut du vendeur n’est pas équivalent à celui de l’acheteur, mieux vaut vacciner les animaux à l’entrée. Par exemple, si votre troupeau est atteint de piétin et que vous achetez des brebis indemnes, mieux vaut vacciner les arrivantes avant le moindre contact. Si vous n’avez jamais eu de chlamydiose et que vous achetez des animaux dans un élevage atteint, ce sont vos animaux qu’il faut vacciner.
Dans tous les cas, le temps que l’immunité soit acquise (environ 1 mois) et stable (environ 3 ans) mieux vaut être prudent et soigner les animaux très rapidement afin d’éviter la propagation de toute épidémie.
Le déparasitage à l’arrivée (externe et interne) limite les risques d’entrée de parasites (notamment gale, poux et douves) jusqu’alors absents du cheptel.
La quarantaine est impérative si les animaux achetés sont gestants, elle se prolonge alors jusqu’à la mise bas, le mélange ne se faisant qu’après la dernière mise bas. Pour les autres catégories d’animaux une quarantaine d’1 mois minimum permet une insertion en douceur et un mélange lent des microbismes ce qui laisse le temps aux animaux de s’acclimater.
QU’EST-CE QU’UNE QUARANTAINE ?
Il s’agit d’isoler les animaux arrivant et le troupeau puis de les acclimater en douceur.
Ils doivent être donc séparés physiquement. Une barrière métallique, une clôture ne conviennent pas. Les arrivants doivent être mis dans un bâtiment à part, au pire au pré s’il s’agit d’un îlot distant du reste des prairies. Le bâtiment choisi doit être facilement désinfectable.
Une fois les contrôles réglementaires effectués, le mélange avec des animaux à l’engrais ou des femelles de réformes saines (éviter les femelles ayant avorté par exemple) permet d’acclimater les nouveaux venus au microbisme de l’élevage.
En pratique, on isole les animaux pendant 15 j puis on les mélange aux réformes pendant au moins 15 j. S’il s’agit de jeunes animaux à faire téter, la mère adoptive sera sortie du lot et mise en quarantaine avec le nourrisson.
A RETENIR
Lorsque j’achète des animaux :
Je limite les origines à 2 troupeaux au maximum.
Je visite l’élevage et m’assure que l’état sanitaire du troupeau est le même que le mien (ni mieux, ni moins bien).
J’utilise un billet de garantie conventionnel pour clarifier la situation
Je déparasite (interne et externe), vaccine et contrôle (ou fait contrôler) l’état de santé des animaux à l’arrivée.
Je mets en quarantaine et re-contrôle l’état de santé 1 mois après.