- Par Maya Diehl
Les Campylobactérioses Partie 1 - Entérites et avortements
Dans ce premier article, nous aborderons les problèmes d’entérites chez l’animal, ainsi que de reproduction provoqués par Campylobacter spp chez les petits ruminants et les bovins. Dans un deuxième volet, nous évoquerons la problématique liée à ce genre de bactéries chez l’humain, avec le risque associé de zoonose.
Caractéristique des Campylobacter
- Bactérie Gram négatif mobile, en forme de spirale ou de bâtonnet fin incurvé.
- Microaérophile, anaérobie stricte pour certaines espèces, croissance optimale en général à 37°C mais avec présence d’une thermotolérance (développement possible encore à 42°C).
- Le genre Campylobacter est présent de façon naturelle dans le tube digestif de nombreux animaux : Campylobacter jejuni se trouve notamment chez les oiseaux sauvages et domestiques (volaille), Campylobacter coli dans les porcs.
- Les Campylobacter sont fragiles : le délai pour mise en culture des prélèvements ne doit pas dépasser 24h à 4°C, sinon, il faut utiliser un milieu de transport protégeant l’échantillon.
- La bactérie apprécie des conditions humides : elle survie jusqu’à un mois dans l’eau à 4°C ainsi que dans les litières.
Campylobacter fetus peut survivre plusieurs mois dans la semence congelée.
- Sensibilité aux pH acides (acidité gastrique protectrice chez les humains). Sensibilité à l’éthanol 70% et à l’eau de Javel à 1%. Elimination de la bactérie par les procédés de pasteurisation.
- La colonisation dans l’intestin est favorisée par la présence d’un à deux flagelles. L’adhérence aux cellules intestinales se fait grâce à des adhésines, molécules à la surface de la bactérie, et d’autres facteurs de pathogénicité qui permettent l’internalisation donc l’entrée des Campylobacter dans les cellules épithéliales de l’intestin.
La répartition des Campylobacter est mondiale : la campylobactériose chez l’homme est la cause la plus fréquente de gastroentérite alimentaire dans les pays occidentaux.
Transmission
Elle se fait par ingestion d’aliment souillé ou d’eau contaminée par les fèces, le sperme en monte naturelle dans le cas des bovins notamment, les sécrétions vaginales, les placentas et avortons en cas d’avortement.
La contamination de l’homme peut également se faire par ingestion d’aliment souillé comme la viande de volaille ou le lait cru non pasteurisé.
Symptômes
Impact sur la reproduction
Petits ruminants
- Campylobacter fetus subsp fetus.
- Avortement de 8 à 60 jours après ingestion de Campylobacter fetus (en règle générale en fin de gestation, parfois dans le deuxième tiers de gestation), ou naissance d’agneaux mort-nés ou faibles. Le placenta est oedématié, et des lésions hépatiques caractéristiques peuvent être observées chez l’avorton. L’immunité naturelle se construit après un avortement et protège les brebis pour plusieurs années.
Diagnostic différentiel :
brucellose, coxiellose (Fièvre Q), chlamydiose, toxoplasmose, listériose, leptospirose, salmonellose, avortement à mycoses notamment.
Bovins
- Campylobacter fetus subsp venerealis essentiellement / rôle de C fetus subsp fetus controversé.
- Infertilité, mortalité embryonnaire précoce, avortement. On observe chez les femelles des retours en chaleur fréquents, des intervalles prolongés entre les chaleurs, et/ou entre deux vêlages. L’infection est ascendante, et peut provoquer métrite et salpingite : l’élimination se fait par formation d’une immunité humorale (anticorps).
- Chez le taureau, l’infection se passe en général de façon asymptomatique. La contamination des femelles se fait par la monte naturelle avec un taureau porteur asymptomatique ou par de la semence contaminée, ou dans le cas des mâles par le matériel de prélèvement de semence non désinfecté entre deux taureaux.
Diagnostic différentiel :
brucellose, coxiellose, leptospirose, néosporose, IBR / IPV, BVD / MD, avortement à mycoses notamment.
Utiliser un écouvillon endocervical pour un prélèvement direct et analyse par PCR.
Entérites à Campylobacter jejuni et Campylobacter coli
(éventuellement C lari et C upsaliensis)
- L’infection peut toucher la volaille, les oiseaux sauvages, les animaux de compagnie (chiens, chats), les animaux de rente (bovins, moutons, chèvres, porcs), les rongeurs et l’homme.
- Habituellement, la maladie se déroule sans provoquer chez l’animal de symptomatique particulière, notamment chez la volaille.
- Les animaux jeunes peuvent éventuellement présenter une atteinte de l’état général et une entérite catarrhale à hémorragique avec épaississement de la muqueuse intestinale (jéjunum et iléon).
- Les animaux restent porteurs-excréteurs asymptomatiques (réservoir) et contaminent leur environnement.
Diagnostic différentiel :
diarrhée à rotavirus, colibacillose, salmonellose, diarrhée alimentaire par exemple.
Prévention des avortements
- Isolement des femelles ayant avorté pour limiter le risque de contamination du reste des animaux.
- Elimination des avortons et placentas aussi rapidement que possible à l’équarrissage.
- Curage et désinfection des bâtiments d’élevage, notamment en cas d’épisode d’avortement.
- Eviter la contamination des aliments par des excréments de ruminants comme d’autres espèces présentes sur l’exploitation.
- Chez les bovins, risque accru en cas de monte naturelle, le prépuce pouvant servir de réservoir chez le taureau : l’achat récent d’un taureau avant une vague d’avortement peut être évocateur de campylobactériose. La réforme du taureau suspect d’être porteur est fortement recommandée.
Prévention des entérites
Limiter le risque de contamination humaine via :
- la pasteurisation du lait.
- Le port de gants et / ou la désinfection des mains en cas de contact avec des matières à risque comme les avortons et le placenta.
- la gestion des viandes (surtout de volaille) : respect de la chaîne du froid, cuisson de la viande à point, nettoyage du matériel ayant été en contact avec la viande potentiellement porteuse