- Par GNIS
Le ray-grass anglais
Le ray-grass anglais, pur ou associé à du trèfle blanc, est une des graminées fourragères les plus utilisées en France. C’est la plante de pâturage par excellence des régions océaniques.
Choix des variétés
Savoir choisir la bonne variété
Le catalogue français des variétés de ray-grass anglais offre une très large gamme variétale avec près de 150 références.
Bien que de la même espèce, ces variétés sont différentes les unes des autres et il convient de raisonner le choix en analysant les différentes caractéristiques des variétés.
La résistance à la rouille
Due à un champignon pathogène, l’impact de la rouille sur le rendement et la qualité des fourrages est important. L’utilisation de variétés résistantes est le seul moyen de lutter contre son développement. Cela permet :
- de produire une herbe plus appétente et mieux valorisée par les animaux, les feuilles malades étant moins bien consommées et moins digestibles,
- d’avoir des prairies plus productives à l’automne et au début du printemps suivant,
- d’allonger la durée de vie des prairies.
La précocité d’épiaison ou date de début d’épiaison
Elle correspond à la date à partir de laquelle les premiers épis sont visibles (environ 10 épis par mètre linéaire). C’est à partir de ce stade que la qualité alimentaire du ray-grass anglais et des autres graminées en général diminue rapidement.
Selon les variétés, les ray-grass anglais atteignent le stade «début épiaison» entre début mai et mi-juin. Il y a donc presque 6 semaines d’écart entre les variétés les plus précoces et les plus tardives.
Les variétés à épiaison tardive offrent aux éleveurs de longues périodes d’exploitation qui permettent de gérer au mieux le pâturage dans les zones où la sécheresse d’été n’est pas excessive. Mais attention, d’une manière générale, les variétés tardives nécessitent des sommes de températures plus importantes pour exprimer leur potentiel, elles sont donc à éviter dans les zones froides.
Ailleurs, comme en Pays de la Loire, où les conditions sèches arrivent plus précocement, les variétés à épiaison plus précoce peuvent être utilisées. Plus les conditions seront séchantes, plus les variétés précoces seront à privilégier pour récolter ou pâturer tôt.
La souplesse d’exploitation
La souplesse d’exploitation correspond à la période pendant laquelle il est possible de faire pâturer les animaux. Cette période démarre au stade «départ en végétation» et s’étend jusqu’au stade «début épiaison». Plus une variété est souple d’exploitation, plus il sera possible de s’organiser pour exploiter le fourrage des différentes parcelles avant l’épiaison. Des écarts de près de 30 jours existent entre les variétés de ray-grass anglais. Pour optimiser le pâturage, il convient donc de s’orienter vers des variétés ayant une grande souplesse d’exploitation.
La ploïdie
Le catalogue français propose des variétés de RG anglais diploïdes et des variétés tétraploïdes. Avec un nombre de chromosomes doublé, les plantes tétraploïdes présentent des cellules plus riches en eau. Cela se traduit donc à l’échelle de la plante par une meilleure appétence par rapport aux variétés diploïdes mais elles sont en revanche plus difficiles à faner. Egalement, de par un plus faible nombre de talles et un port plus étalé, les variétés tétraploïdes sont légèrement plus sensibles au piétinement. En compromis, une association des types est possible à raison de 2/3 de tétraploïde pour 1/3 de diploïde (en poids de semences).
La remontaison
Une plante remontante est une plante qui renouvelle son cycle de reproduction suite à une exploitation. Pour les graminées, de nouveaux épis se formeront donc après avoir été exploités en fauche ou en pâture. Les plantes épiées génèrent des refus au pâturage car elles présentent une qualité inférieure aux plantes qui restent feuillues. Le ray-grass anglais présente une prédisposition à la remontaison mais il existe des variétés moins remontantes qui favorisent une meilleure qualité de la prairie.
Répartition du rendement et production d’été-automne
La production des graminées fourragères se fait principalement au printemps. Toutefois, la sélection a permis d’améliorer la répartition de la production dans l’année en améliorant notamment le rendement d’été-automne. Pour le ray-grass anglais, prendre en compte ce critère peut permettre d’allonger significativement la période de pâturage en arrière-saison. Le rendement d’arrière saison est généralement lié à une bonne tolérance aux maladies estivales.
L’amélioration des variétés est quantifiable
Une grande étude nationale menée pendant 3 ans par l’ACVF* et l’INRA a permis de mesurer concrètement les améliorations réalisées en 50 ans de sélection du ray-grass anglais. Les chercheurs ont ainsi comparé dans des conditions similaires, des variétés inscrites depuis 1965 jusqu’à aujourd’hui.
L’étude a mis en évidence que le rendement global des ray-grass anglais augmente en moyenne de 1 % tous les 3 ans soit environ 3 qx/ha tous les 10 ans ce qui offre un potentiel de production d’environ 250 kg de matière sèche consommée par ha.
La qualité n’est pas en reste car la digestibilité de la matière organique progresse de 0,5 point tous les 10 ans. Ainsi, un point de DMO supplémentaire implique en moyenne un gain de 0,5 Kg de lait par vache et par jour. Le potentiel de production supplémentaire lié à la quantité est donc de 0,25 kg de lait/vache/jour de pâturage.
Un gain concret et important
Avec l’exemple d’une saison de pâturage de 120 jours et avec 0,4 ha/vache dans les conditions de conduite optimale, le potentiel de gain dû au progrès génétique est :
• pour le rendement : 250 kg x 0,4 ha soit 100 kg de lait,
• pour la qualité : 0,25 kg x 120 jours soit 30 kg de lait.
Le gain potentiel de production de 130 kg de lait est donc lié pour 3/4 au gain de rendement et pour 1/4 au gain de qualité.
Semis et implantation
Une installation facile et une bonne pérennité
Le ray-grass anglais est une des graminées fourragères la plus simple à installer. Sa rapidité de germination et de développement ainsi que sa forte capacité de tallage permettent un démarrage vigoureux qui limite les risques de concurrence par les adventices. Il tolère une préparation du sol assez sommaire, voire un semis direct. En conditions favorables, il peut produire entre 4 et 8 ans et son puissant système racinaire favorise une bonne structure du sol.
Semis de printemps ou semis de fin d’été ?
D’une manière générale, on aura tendance à privilégier les semis de fin d’été. Le sol est réchauffé, la nature moins concurrentielle et les probabilités de pluviométrie sont plus importantes qu’au printemps. Dans les sols très hydromorphes voire inondés, il faudra s’orienter sur les semis de printemps. Dans tous les cas, le ray-grass anglais qui est particulièrement adapté aux régions à climat humide et tempéré possède des capacités d’adaptation qui permettent des semis tardifs, aussi bien au printemps qu’en automne.
Pour un semis efficace
Malgré le fait que le ray-grass anglais tolère, au même titre que les ray-grass d’Italie et hybride, une préparation de sol assez sommaire, il faut tout de même confectionner un lit de semences bien émietté et suffisamment rappuyé à l’aide d’un rouleau pour assurer une levée plus rapide et homogène.
Le semis «à la volée» est idéal pour les fourragères afin de garantir une homogénéité du couvert et limiter le salissement entre les rangs. Un semoir en lignes (à céréales) est idéal pour répartir les semences régulièrement sur le sol à condition de relever les éléments semeurs. Il ne faut pas chercher à enterrer les semences lors du semis.
La profondeur idéale de 1 cm sera atteinte avec un passage de rouleau type cultipacker ou un crosskill qui permettra d’assurer un bon contact sol/graine et ainsi de favoriser et d’accélérer la germination et la levée. Le semis direct sans travail du sol est également possible dans de bonnes conditions.
Semer à la bonne dose : ni trop, ni trop peu
En fonction de la ploïdie des variétés de RGA, on adaptera la dose de semis. Pour les diploïdes, la dose est de 20 à 25 kg/ha alors que pour les tétraploïdes, la dose est de 25 à 30 kg/ha. Il faut également moduler la dose en fonction des conditions de semis. Lorsqu’elles sont idéales, le chiffre inférieur de la fourchette est suffisant. Une dose de semis trop faible peut engendrer des espaces vides et donc le salissement. A l’inverse, une densité trop élevée augmentera la concurrence entre les jeunes plantes et limitera le tallage.
Les astuces pour les semis d’associations
En cas de semis d’une association RGA et trèfle blanc par exemple, il faut impérativement un lit de semences fin et bien rappuyé. Il est possible alors d’envisager un semis en 1 ou 2 passages.
• Un seul passage : dans ce cas, il est conseillé de remuer régulièrement les semences dans le semoir ou de ne verser que de faibles quantités du mélange pour éviter que la légumineuse, plus dense se retrouve rapidement au fond du semoir.
• Deux passages : Il est possible de commencer à semer la graminée classiquement puis faire un deuxième passage pour la légumineuse à l’aide d’un distributeur à anti-limace par exemple. Sinon, il s’agit tout simplement de semer la graminée en commençant d’un coté de la parcelle et de semer la légumineuse en commençant de l’autre coté. Les parcelles étant rarement rectangulaires, les rangs se chevaucheront légèrement assurant une bonne répartition.
Ce qu’il faut retenir :
• Préférer les semis de fin d’été.
• Le roulage conditionne largement la réussite du semis.
• Respecter les doses de semis.
• Adapter la technique de semis pour les associations.
Conduite et exploitation
Le RGA, particulièrement adapté au climat océanique et aux terres fraîches, offre un fourrage d’une excellente valeur alimentaire. C’est dans ces conditions qu’il est productif et qu’il dure le plus longtemps. Grâce à son puissant système racinaire et à ses très nombreuses talles au ras du sol, il supporte des chargements élevés d’animaux à l’hectare ce qui en fait une espèce particulièrement adaptée pour le pâturage. A moins d’un surpâturage extrême, le ray-grass anglais repart toujours après le passage des animaux.
Un pâturage précoce est possible
Au printemps, le ray-grass anglais peut être pâturé tôt dès que le stade «départ en végétation» est atteint. Selon les régions et les variétés, c’est entre la fin du mois de mars et le début du mois d’avril. Le démarrage en végétation est initié sous deux conditions : lorsque le zéro de végétation de la plante est dépassé et lorsque la somme des températures, depuis le 1er janvier, a atteint un certain seuil qui est variable selon les espèces.
Outre le fait d’offrir du fourrage tôt en saison aux animaux, un pâturage rapide précoce, appelé aussi déprimage aura pour effet de multiplier le nombre de talles en favorisant l’accès à la lumière au pied des plantes.
Les cycles de 28 jours sont un bon compromis
D’une manière générale, il est préférable de faire pâturer tôt pour avoir de l’herbe de meilleure qualité. Il existe un moyen de repère simple : la botte ! Le stade idéal pour faire pâturer du ray-grass anglais est atteint quand l’herbe arrive à la cheville et recouvre la botte. Quoi qu’il en soit, l’apparition des premiers épis indique qu’il faut retirer les animaux de la parcelle car l’appétence va diminuer ainsi que la valeur alimentaire. Les variétés caractérisées par une grande souplesse d’exploitation permettent donc de bénéficier de plus de temps pour organiser le calendrier de pâturage. De plus, les tiges du RGA durcissent assez lentement ce qui permet de maintenir un stock d’herbe sur pied à faire pâturer à un stade un peu plus avancé que le dactyle ou la fétuque élevée. Cependant, des cycles de pâturage de 28 jours sont un bon compromis pour allier rendement et qualité.
La fauche est possible
Si les premiers épis apparaissent et que le pâturage n’est pas envisagé, c’est au stade «début épiaison» qu’il est fortement conseillé de faucher le ray-grass anglais pour l’ensiler ou faire du foin. Bien que sélectionné pour une utilisation en pâturage, le ray-grass anglais peut être fauché à condition de privilégier des variétés diploïdes moins riches en eau. Egalement, les variétés précoces ont généralement un port plus dressé qui les rendent plus faciles à faucher.
Les précautions estivales
Le ray-grass anglais ralentit sa croissance à partir de 20 °C et ne pousse pratiquement plus au-delà de 25 °C. Il ne meurt pas pour autant mais il entre en dormance estivale.
Il préserve alors son énergie pour redémarrer lorsque les conditions sont plus favorables, dès que la fraîcheur et l’humidité reviennent. Dans ces conditions et pour faciliter le redémarrage de fin d’été, il est impératif d’éviter la surexploitation pour épargner les réserves de la plante qui sont stockées dans la base des tiges. Les variétés les plus résistantes à la rouille permettent d’exploiter l’herbe plus longtemps au début de l’été et redémarrent plus rapidement au début de l’automne.
L’herbe d’automne est un atout à valoriser
Une fois la période estivale passée, les plantes développent de nouvelles tiges et feuilles très appétentes et de très bonne valeur alimentaire. Le travail de sélection a véritablement amélioré les rendements pour cette période sur les variétés récentes, c’est d’autant plus de fourrage qu’il est possible de valoriser. Avant l’hiver et les gelées qui vont abimer les feuilles, il est nécessaire de «nettoyer» la parcelle en réalisant un pâturage ou une fauche. Au printemps suivant, les plantes auront ainsi accès à la lumière et à la chaleur rapidement, ce qui favorisera le démarrage.
Le sursemis est envisageable
La germination et l’installation sont rapides, ce qui en fait l’espèce à privilégier pour mettre en place cette technique de rénovation des pâtures abimées ou vieillissantes. Pour faire face à la flore en place, il est conseillé de conserver les doses classiques de semis.
Associations et mélanges
Ray-grass anglais / trèfle blanc, une association complémentaire
Une association d’une graminée avec une légumineuse présente de nombreux intérêts, aussi bien qualitatifs que quantitatifs.
Prédisposé également au pâturage, le trèfle blanc est particulièrement adapté pour être associé avec le ray-grass anglais. Toutefois, pour conserver un équilibre entre les deux plantes pendant la durée de vie de la prairie, il est nécessaire de bien choisir la variété de trèfle blanc et de ne pas dépasser la dose de 3 kg/ha.
Il existe des types de trèfle blanc plus productifs que d’autres et le choix dépendra principalement de l’agressivité du ray-grass anglais. Cette agressivité est directement liée à la précocité et la ploïdie de la graminée. L’illustration ci-dessous présente les types de trèfle blanc à choisir en fonction de l’agressivité du ray-grass anglais.
De nombreux avantages
• La complémentarité des deux familles permet d’allonger la période de pâturage à la fin du printemps et à l’automne grâce à une production décalée et à la grande stabilité de la valeur alimentaire de la légumineuse.
• La légumineuse contribue également à augmenter le rendement de la prairie.
• La chute de qualité de la prairie en fin de cycle est moins brutale qu’avec du ray-grass anglais seul.
• La fixation de l’azote de l’air par les nodosités des légumineuses permet de couvrir en partie ou intégralement les besoins en azote du ray-grass anglais. Les économies d’azote minéral peuvent s’avérer considérables à l’échelle de l’exploitation.
• L’introduction de légumineuses dans les prairies permet de produire des protéines sur l’exploitation contribuant ainsi à augmenter l’autonomie en protéines des élevages.
Les conseils
• Le désherbage devient plus délicat du fait de la présence de deux familles, il est donc important de soigner l’implantation.
• Une prairie bien équilibrée comportera environ 30 % de trèfle blanc au printemps et 50 % en été. Au-delà de 60 % de trèfle, les risques de météorisation au pâturage sont importants et l’équilibre de la prairie est fragilisé ce qui aura pour incidence de diminuer la productivité de la graminée.
Le trèfle blanc n’apprécie pas l’excès d’humidité
En zone très humide, il est possible de remplacer le trèfle blanc par du trèfle hybride (entre 2 et 4 kg/ha). Il tolère parfaitement l’humidité et présente un intérêt supérieur au trèfle blanc pour la fauche. Il conviendra par contre d’utiliser un ray-grass anglais agressif car le trèfle hybride est plus poussant que le trèfle blanc.
Le ray-grass anglais, espèce de base dansles mélanges
Le ray-grass anglais aura presque toujours sa place dans les mélanges d’espèces. De par son installation rapide, il permet aux espèces plus lentes d’implantation de se développer sans être concurrencées par les adventices. En fonction des objectifs de production et du type de sol, le ray-grass anglais contribuera plus ou moins à la productivité de la prairie. Les doses de semis seront à moduler en fonction du rôle qui lui est destiné dans le mélange (couvre sol ou production) mais en règle générale, il ne dépassera pas la dose de 12 kg/ha sur les 30 kg/ha maximum qui composent le mélange.
Ce qu’il faut retenir
• Le trèfle blanc est la plante d’accompagnement idéale du ray-grass anglais.
• Le type de trèfle est à raisonner en fonction de l’agressivité du ray-grass anglais.
Valeur alimentaire
Un fourrage de qualité, équilibré
Le ray-grass anglais est une des graminées fourragères la plus riche en énergie. C’est un fourrage très apprécié des animaux et naturellement équilibré en énergie et en protéine. Le rapport PDIE/UFL proche de 100 sur le premier cycle d’exploitation (cf. tableau ci-dessous) assure un remarquable compromis entre une bonne qualité fourragère pour l’alimentation des vaches laitières et des autres animaux et une maîtrise satisfaisante des rejets azotés. Un fourrage relativement trop riche en PDI augmente en effet les rejets azotés des animaux.
*Association des Créateurs de Variétés Fourragères
D’après les Petits guides prairies, Ray-grass anglais, proposé par le GNIS