Mélanges de semences pour prairies de longue durée en France (3 ans et plus)

PRÉCONISATIONS AGRONOMIQUES 2017

Les mélanges prairiaux, tout comme les associations simples d’une variété de graminée avec une variété de légumineuse ou encore les semis d’espèces pures, constituent aujourd’hui une gamme de solutions techniques pour le semis des prairies. Autant de solutions à combiner ou à choisir selon les contextes de production et les attentes des éleveurs. Les préconisations fournies dans ce document constituent un guide pour les agriculteurs, les prescripteurs et les semenciers pour le choix des semences et la composition des mélanges.

Ce guide concerne les prairies de longue durée (3 ans et plus), les prairies de courte et moyenne durée sont traitées dans le document Mélanges de semences pour prairies de courte et moyenne durée en France (moins de 3 ans), Préconisations agronomiques.

Mélanges de semences  pour prairies de longue durée en France (3 ans et plus)

Règles concernant les espèces et variétés

Principes généraux


Les meilleurs mélanges seront obtenus à partir des meilleures variétés, en tenant compte de leur capacité à être associées.
Les variétés recommandées sont celles du Catalogue Français ou, à défaut, celles du Catalogue Européen (www.gnis.fr) et doivent avoir subi avec succès les tests officiels pour la production fourragère. Les variétés certifiées sont reconnaissables par l’apposition d’une étiquette bleue sur le sac de semences. Il est rappelé que seules les variétés inscrites au Catalogue Français ont subi avec succès ces tests dans les conditions pédoclimatiques françaises. D’importantes différences de qualité existent entre variétés par exemple sur la rouille pour le ray-grass d’Italie ou sur l’oïdium pour le trèfle incarnat.
Pour constituer un mélange, nous recommandons d’utiliser prioritairement les espèces à certification obligatoire parmi les espèces utilisées comme plantes fourragères. Les principales caractéristiques variétales de la plupart de ces espèces (critères agronomiques et valeur alimentaire) sont consultables sur www.herbe-book.org.

Quelques définitions


Afin de faciliter la compréhension des différents critères utilisés pour qualifier les espèces fourragères, quelques définitions sont rappelées :

Remontaison : capacité d’une variété (ou d’une espèce) à refaire des épis après une exploitation qui a supprimé ceux de la pousse précédente.

Ploïdie : le nombre de chromosomes d’une variété tétraploïde a été multiplié par deux. Cela se traduit par des plantes ayant des organes plus gros et par une teneur en matière sèche plus faible que dans le cas des variétés diploïdes.

Dormance : état de la plante pendant lequel la croissance est stoppée.


Particularités biologiques des espèces pour mélanges prairiaux de longue durée


Les particularités de la biologie des espèces à prendre en compte pour leur utilisation sont les suivantes :

Comportement au sein du mélange
La composition des mélanges doit prendre en compte le pouvoir de concurrence des espèces et variétés au cours de phases-clé de la prairie. Cette notion est complexe : elle inclut différents critères dont les quatre retenus dans le tableau ci-après.

Espèces majeures


Graminées

  • Ray-grass anglais (RGA) : le ray-grass anglais est la graminée très dominante des zones océaniques tempérées. En revanche, elle supporte moins la sécheresse et les températures élevées. Son implantation est rapide. C’est la graminée la plus riche en énergie et la plus appétente. Il existe de grandes différences de précocité entre les variétés et deux ploïdies, les choix des variétés est donc à réfléchir selon le type d’utilisation souhaité. Par exemple, les variétés les plus tardives sont mieux adaptées au pâturage, les plus précoces sont plus résistantes en situations froides ou séchantes. En ce qui concerne la ploïdie, les variétés diploïdes présentent un tallage plus important et sont moins riches en eau; les variétés tétraploïdes sont plus appétentes et plus riches nutritionnellement.

  • Ray-grass hybride (RGH) : cette espèce s’implante rapidement, sur tout type de sol. Sa productivité est bonne, cependant, l’espèce présente une dormance estivale. Plutôt adapté à la fauche, il est moins remontant et de meilleure valeur nutritionnelle qu’un ray-grass d’Italie. Sa pérennité est de 3 ans maximum.

  • Dactyle : le dactyle est adapté aux sols séchants et supporte les températures élevées. Il est déconseillé dans les sols hydromorphes car il supporte mal l’excès d’eau. Son installation est lente mais sa pérennité est élevée. Le dactyle épie début mai et est non remontant. C’est la graminée la plus riche en protéines. Son appétence peut être diminuée par une utilisation trop tardive.

  • Fétuque élevée : cette espèce aime les sols profonds et supporte bien les sols hydromorphes, la sécheresse et les températures élevées. Elle est très pérenne mais s’installe très lentement. Son épiaison a lieu début mai et elle est non remontante. Elle démarre tôt en végétation. Sa valeur alimentaire est moyenne à bonne. Son appétence peut être diminuée par une utilisation trop tardive.

  • Fétuque des prés : cette espèce supporte bien le froid, la neige et les conditions de sol humide. Elle craint les contextes séchants et les fortes températures. Son installation est très lente. Son appétence et sa valeur alimentaire sont bonnes ; son épiaison a lieu début mai et elle est non remontante.

  • Fléole : cette espèce est adaptée aux sols acides et humides et convient particulièrement bien dans les zones à hivers très froids. Son installation est très lente et son épiaison est plus tardive que celle des autres graminées.

Légumineuses

  • Trèfle blanc : l’utilisation de cette légumineuse peut être très large. Les seules situations présentant moins d’intérêt pour sa culture sont celles d’excédent de fertilisation azotée, de difficulté de désherbage, de recours à de grandes légumineuses ou de prairies de courte durée (installation relativement lente). Le trèfle blanc est également à éviter en sols hydromorphes.

  • Luzerne : cette espèce est adaptée aux sols calcaires bien drainés et fonctionne également bien avec inoculation sur des sols relativement acides avec chaulage. En revanche, elle ne supporte pas les sols hydromorphes ni les sols très acides. C’est l’espèce la plus productive en conditions chaudes, sèches et humides. Elle est riche en protéines, moins en énergie. Elle n’est pas adaptée à une utilisation en pur au pâturage en raison des risques de météorisation.

  • Trèfle violet : Cette espèce s’implante facilement et rapidement. Elle tolère les sols humides et acides et s’adapte à de basses températures. En revanche, sa résistance à la chaleur et à la sécheresse est moyenne. Le trèfle violet est très productif et possède une bonne valeur alimentaire, bien équilibrée. Il est adapté à la fauche et présente des risques de météorisation. Sa pérennité varie de 2 à 3 ans.


Autres espèces

Espèces présentant un intérêt fourrager :

Graminées

  • Festulolium : cette famille de plantes est issue de croisements entre ray-grass et fétuque. Elle couvre une très large palette de comportements et d’adaptations aux conditions pédoclimatiques, aux modes d’utilisations et à la durée de la culture. Il est important de prendre en compte les caractéristiques de la variété et le positionnement des espèces parentes ou proches pour évaluer l’intérêt de l’utilisation dans un mélange.

Légumineuses

  • Sainfoin : espèce d’implantation relativement lente, réservée aux sols calcaires. Le sainfoin dispose d’une bonne productivité, y compris en situation séchante et chaude. Il est principalement utilisé en fauche et peut être cultivé en pur. Sa bonne capacité de séchage confère un intérêt particulier à cette légumineuse. Elle est également riche en protéines et en tanins et non météorisante. Sa pérennité est variable selon les variétés.
  • Lotier corniculé : intéressant sur sols pauvres superficiels et séchants, il est peu agressif et peu productif. Sa dormance est variable entre les différentes variétés et sa pérennité est de 4 ans. Le lotier est bien adapté au pâturage mais est aussi utilisable en fauche. Généralement non météorisant, il est riche en protéines et en tanins.
  • Trèfle hybride : le trèfle hybride s’installe assez rapidement, supporte l’immersion et reste productif dans les sols compactés, humides, acides et asphyxiants. Cette espèce est très résistante au froid mais sensible à la sécheresse. Elle est adaptée au pâturage comme à la fauche et présente des risques de météorisation. Le trèfle hybride possède une bonne teneur en protéines et révèle un bon comportement en association. Sa pérennité varie de 2 à 3 ans.

Espèces présentant moins d’intérêt fourrager mais remplissant d’autres fonctions au sein du mélange :

Graminées

  • Pâturin des prés : très long à implanter, il a principalement des fonctions d’engazonnement et de limitation des salissements pour des utilisations en pâturage de longue durée, uniquement en mélanges. Il est sensible aux rouilles et peu productif.
  • Fétuque rouge : intérêt en engazonnement sur sol pauvre, uniquement en mélanges.

Légumineuse

  • Minette : pérennité de 1 à 2 ans, très peu agressive, milieux pauvres.

Règles de composition

Principes généraux

Mélanges de semences de densités et de tailles différentes

Au cours de la manutention et du transport, il y a un risque de sédimentation des semences. Pour des mélanges d’espèces dont les semences ont des densités différentes, il est conseillé de les mélanger avant et en cours de semis. La différence de tailles de graines entre les légumineuses et les graminées (généralement plus grosses) nécessite d’avoir un lit de semences suffisamment fin et de semer dans le premier centimètre, pour permettre à la légumineuse de s’installer correctement.

Nombre maximum de constituants (espèces ou variétés)

D’une manière générale, il ne nous semble pas utile d’associer plus de huit variétés au total, parmi six espèces différentes au maximum, chacune devant apporter des fonctions complémentaires.

Taux d’incorporation

En France, le taux minimum d’incorporation réglementaire d’une variété dans les mélanges fabriqués est de 5% du poids total du mélange.

Dose maximale de semis

D’une manière générale, la dose maximale de semis d’un mélange ne devrait pas dépasser 30 kg/ha, afin que chaque variété puisse s’exprimer. Ceci s’entend à l’exception des mélanges contenant du brome (graine plus grosse).



Eléments de décision à prendre en compte dans la réalisation du mélange


Utilisation principale de la prairie

Il y a 3 situations :

  • Pâturage - l’utilisation presque exclusive est le pâturage par les animaux, les fauches sont très rares
  • Mixte - l’utilisation est mixte entre pâturage et fauch
  • Fauche  - l’utilisation principale est la fauche, le pâturage peut avoir lieu mais de façon occasionnelle


Conditions pédoclimatiques

Il y a 5 types de conditions pédoclimatiques :

  • Sain et profond    
  • Hydromorphe
  • À alternance hydrique : mouillé l’hiver, séchant l’été      
  • Séchant acide    
  • Séchant calcaire



AFPF
Ce document de synthèse est issu d’un travail collectif réalisé par les membres de l’AFPF suivants : Michel Deraedt (BTPL), Olivier Estrade (UFS), François Gastal (INRA), Christian Huyghe (INRA), David Knoden (Fourrages Mieux), Xavier Lacan (UFS), Agathe Legendre (AFPF), Pascale Pelletier (Arvalis-Institut du Végétal), Jérôme Pavie (Institut de l’Elevage), Patrice Pierre (Institut de l’Elevage), Pierre-Vincent Protin (Arvalis-Institut du Végétal), Michel Straëbler (GNIS).