- Par Christelle Dubois-Frapsauce
Appareil reproducteur mâle et ses pathologies Exemple des béliers
Les béliers représentent souvent un investissement important pour les éleveurs quand ils cherchent à améliorer la génétique de leur troupeau. De plus un bélier permet de produire 100 à 300 agneaux ou agnelles de renouvellement. A l’achat et à l’introduction d’un bélier, il est donc important de prendre un certain nombre de précautions et de réaliser un examen clinique de l’animal et de l’appareil reproducteur. L’examen de l’appareil reproducteur devra être renouvelé avant chaque mise en lutte : les pathologies de l’appareil reproducteur peuvent induire une diminution de la fertilité du troupeau.
Nous présentons ici quelques rappels anatomiques et les principales pathologies qui peuvent être rencontrées.
ANATOMIE
Les testicules descendent pendant la vie fœtale dans leur enveloppe de peau, le scrotum. Cette localisation leur permet de rester à une température de 4 à 7° en dessous de la température corporelle. Les testicules sont des glandes qui produisent la testostérone et le lieu de production et de maturation puis de stockage (dans l’épididyme) des spermatozoïdes.
Les vésicules séminales produisent le liquide séminal qui contient les éléments nécessaires à nourrir les spermatozoïdes et permet de les transporter. Les vésicules stockent le sperme entre deux éjaculations. Elles peuvent être le siège d’infections.
Le pénis, long, forme un S dit pénien dans lequel peuvent se bloquer des calculs urinaires. L’urètre parcours le pénis jusqu’à l’appendice vermiforme où peuvent aussi se bloquer des calculs. Le pénis se termine par le gland. Ils sont entourés par le fourreau qui de termine par le prépuce.
L’éjaculation permet de propulser les spermatozoïdes dans le canal déférent et l’urètre ; ils sont mélangés avec les sécrétions des glandes annexes pour former l’éjaculât.
La thermorégulation se fait par échanges thermiques entre le sang artériel et le sang veineux qui circulent dans les cordons testiculaires et par sudation grâce à la présence de nombreuses glandes sudoripares dans la peau du scrotum.
Le poids des testicules (100 à 300 g) varie en fonction de la race, de la période de l’année pour les races saisonnées.
EXAMEN CLINIQUE
Pour effectuer cet examen, on assoit le bélier dans un endroit bien éclairé.
Prépuce et pénis
- L’extériorisation du pénis doit se faire sans difficulté en position assise, dos vertical. On vérifiera l’intégrité de l’appendice vermiforme.
- On recherchera tout particulièrement la présence de lésions ulcératives au niveau de la jonction cutanéo-muqueuse. Ces lésions peuvent caractériser un ecthyma contagieux ou une balanoposthite ulcéreuse (vulvovaginite ulcéreuse de la brebis).
Scrotum et testicules
Pour un examen correct, on doit prendre le scrotum avec les deux mains, assez près de l’abdomen, puis palper l’ensemble en redescendant vers l’extrémité du scrotum.
On recherchera :
- Extérieurement, la présence de lésions de dermatite (Gale chorioptique, dermatophilose), d’abcès, de cicatrices (tonte) pouvant affecter la spermatogénèse par une inflammation
- A la base de la paroi abdominale, l’existence d’une hernie inguinale révélée par la palpation d’une masse fluctuante ; on peut aussi rechercher des cicatrices de vasectomie,
- La présence des deux testicules (monorchidie, cryptorchidie),
- A évaluer la taille des testicules. Le périmètre scrotal est un indice intéressant concernant la capacité à la production de sperme.
Cette taille varie selon l’âge, la race et surtout la période de l’année (maximale d’août à novembre).
Le périmètre scrotal peut varier de 25 à 35 cm.
Une hypoplasie testiculaire uni ou bilatérale peut être observée de façon normale chez des jeunes agneaux de moins d’un an. - La palpation des testicules devra permettre, outre leur taille, la mise en évidence d’une inflammation éventuellement accompagnée d’adhérences, d’induration et de réactions douloureuses indiquant une orchite.
- De même, la queue de l’épididyme sera examinée.
Une augmentation de volume ou une induration sont les signes d’une épididymite. - Généralement, face à une suspicion d’atteinte infectieuse du testicule et de ses annexes, une sérologie complétera le diagnostic clinique pour une recherche des principales maladies abortives dues à Brucella ovis, Brucella mélitensis, Salmonella abortus ovis, Chlamydophila abortus, Coxiella burnetii.
- Des augmentations de volume de la tête du testicule, de consistance dure peuvent être dues à un spermatocèle ou à un varicocèle, et doivent conduire à écarter le bélier de la reproduction.
Avant l’âge de 8 mois, on observe une grande hétérogénéité dans l’aptitude des agneaux à féconder des brebis, bien qu’ils soient capables d’éjaculer dès 4 mois. A cette période, la liaison prépuce pénis se rompt, on note une modification de la voix ainsi qu’une rougeur cutanée inguinale.
Les capacités reproductrices sont maximales de 2 à 5 ans, puis déclinent à partir de 7 ans et on constate une atrophie progressive du tissu testiculaire.
PATHOLOGIES
Monorchidie, cryptorchidie
Il arrive parfois que la palpation du scrotum révèle l’absence d’un ou des deux testicules : si un testicule est présent, on parle de monorchidie, si les deux sont absents, on parle de cryptorchidie.
Le plus souvent, un ou les deux testicules sont restés en position intra-abdominale au lieu de descendre dans le scrotum pendant le développement fœtal. Il en résulte une température trop élevée qui va gêner la production des spermatozoïdes. De plus, il existe un risque de tumorisation du testicule en position intra-abdominale.
Inflammation du prépuce et du gland
Posthite : inflammation du prépuce,
Balanite : inflammation du gland,
Balanoposthite : inflammation des deux.
Les causes peuvent être bactériennes (Posthite enzootique (vulvites des brebis) à Corynebacterium : transmission par voir vénérienne, Balanoposthite ulcérative à mycoplasme) ou virale (ecthyma contagieux).
Les symptômes communs sont un refus d’accouplement, des postérieurs arqués, une douleur et une chaleur du fourreau, du prépuce et parfois du pénis, des saignements au niveau du prépuce ou après la miction, une sténose du prépuce, des adhésions entre le prépuce et le pénis. On peut constater une nécrose, des ulcères ou des croûtes ou des lésions d’ecthyma, un œdème du fourreau.
Les traitements sont essentiellement locaux : nettoyage, antisepsie, aérosol antibiotique. Un traitement général avec un antibiotique peut être parfois nécessaire.
Des mesures hygiéniques doivent être prises : l’animal atteint doit être retiré des plans de reproduction et isolé et les individus en contact avec le ou les animaux atteints doivent être contrôlés.
Orchites et péri-orchites
L’orchite peut varier d’une simple inflammation du testicule à une destruction suppurative et nécrotique de l’organe. Elle peut être aiguë ou chronique, unilatérale ou bilatérale.
L’infection peut venir initialement du testicule ou bien avoir été transmise par le sang. L’origine peut aussi être une infection de l’épididyme.
Les principaux agents de ces infections sont des Brucella, des mycoplasmes et les bactéries provoquant des épididymites.
Les orchites semblent plus souvent unilatérales et impliquent fréquemment l’épididyme (orchi-épididymite). Dans la phase aiguë, le testicule est inflammé, chaud, augmenté de volume jusqu’à 5 fois et très douloureux. Dans la phase chronique, le testicule adhère à la tunique et au scrotum, il devient fibrotique et induré.
On peut observer des boiteries chez certains animaux causées par la douleur testiculaire. Cette dernière peut aussi engendrer une baisse de libido. L’animal devient peu à peu infertile.
Le diagnostic se fait avec une douleur à la palpation, un scrotum augmenté de volume, une asymétrie scrotale, une adhérence entre testicule et enveloppes
La castration permet de sauver l’animal qui, même si la guérison spontanée est envisageable, perdra quoi qu’il arrive le testicule atteint. Un traitement antibiotique est envisageable sauf lors de brucellose.
En cas de suspicion, l’animal suspect doit être isolé et testé. Les autres mâles en contact avec ce dernier doivent être palpés et en cas de doute testés à leur tour.
En prévention, tout mâle introduit dans un nouveau cheptel doit être palpé pour constater de l’absence de lésions du scrotum, des testicules et des épididymes. Il est préférable de faire cette palpation sur tous les mâles reproducteurs avant la saison de reproduction afin d’éviter une éventuelle contamination des femelles et des autres mâles.
Epididymites
De nombreuses bactéries peuvent être à l’origine d’une épididymite, peu en sont spécifiques.
Cas de l’épididymite contagieuse du bélier à Brucella Ovis
Il s’agit d’une maladie régionale, très contagieuse. Les porteurs sains sont fréquents.
Après 2 à 8 semaines d’incubation et une courte phase aiguë accompagnée de fièvre, les lésions le plus souvent unilatérales s’installent et concernent l’épididyme et le testicule. Elles entraînent une production de semence en faible quantité sans que la libido soit affectée.
La palpation des bourses permet de mettre en évidence l’inflammation de la queue de l’épididyme qui augmente de volume avant de s’indurer, et le développement d’adhérences. Mais ces lésions n’apparaissent que 6 à 18 semaines après contamination.
L’infection est persistante plusieurs années.
La maladie se transmet par l’introduction ou le mélange d’animaux (achat, transhumance). Brucella ovis est excrétée dans la semence du bélier et dans son urine. Elle se transmet par voie sexuelle essentiellement pendant la lutte. Les femelles sont également porteuses et peuvent en particulier excréter la bactérie dans le lait.
Le diagnostic se fait suite à une baisse des résultats de reproduction, la palpation testiculaire et le recours au laboratoire.
Un diagnostic bactériologique peut être effectué sur la semence.
Un diagnostic sérologique peut également être réalisé.
Le traitement n’est le plus souvent pas mis en place, les élevages utilisant plutôt une stratégie de prévention et /ou d’éradication.
La prophylaxie reposera à l’échelle d’un troupeau sur des prises de sang à l’achat des mâles comme des femelles avec mise en quarantaine. L’éradication se fera par la détection et l’élimination des béliers infectés. Une politique de maîtrise de la maladie peut être mise en œuvre localement.