- Par AP
Bilan maïs fourrage 2022 Des rendements en forte baisse
Arvalis a publié son habituel bilan de campagne pour la production de maïs ensilage en France et dans les régions. Les différents événements climatiques de 2022 ont eu des conséquences sur les caractéristiques nutritionnelles de ce fourrage, essentiel pour beaucoup d’éleveurs.
Bilan agrométéorologique maïs fourrage 2022
Un été très chaud et sec, des rendements en forte baisse
Après un bon démarrage des maïs, favorisé par des températures excédentaires au printemps, l’été particulièrement chaud et sec a fortement pénalisé la production de grains et accéléré la dessication de l’appareil végétatif en fin de cycle. L’année a été particulièrement précoce, et les rendements sont pénalisés dans la majorité des régions, la moyenne nationale se situant autour de 11 t MS/ha.
Les surfaces en maïs fourrage emblavées en 2022 sont stables par rapport à 2021 confirmant une tendance pluriannuelle à la baisse, à un peu moins de 1.28 Mha selon Agreste. Cette tendance pourrait se confirmer dans les prochaines années si la diminution des effectifs du cheptel bovins lait se poursuit.
Les semis précoces à normaux (jusqu’au 5-10 mai) ont bénéficié de conditions favorisant une bonne implantation. Les mois de mai et juin ont été particulièrement chauds (+100 °C b6-30 depuis le 1/05) impliquant des levées et un recouvrement des inter-rangs rapides et une avance de stade importante à fin juin. En revanche, les levées des maïs semés tardivement dans des sols très secs ont été très hétérogènes.
Les conditions du printemps (mois de mai très sec) ont limité la pression des adventices. Bien que l’efficacité des herbicides racinaires ait été réduite, les interventions mécaniques (herse étrille, binage…) ont pu être réalisées dans de très bonnes conditions.
Moins de dégâts de prédateurs en début de cycle
Du côté des ravageurs, les dégâts ont globalement été limités par rapport à ces dernières années. La période de semis resserrée dans le temps et les levées rapides ont réduit la période d’exposition aux corvidés, même si des dommages ont pu être constatés localement. Les conditions de fin d’hiver/début de printemps et la régulation mise en oeuvre dans certaines régions ont aussi pu limiter l’exposition des parcelles aux risques d’attaques. Les levées rapides ont aussi limité les dégâts de taupins. Concernant les foreurs, des vols très précoces ont été constatés en culture, mais avec des dégâts plus faibles que ces dernières années.
Rendement moyen national à 11.2 t MS/ha : une forte hétérogénéité selon les régions
La deuxième partie du cycle du maïs s’est déroulée dans des conditions très sèches et chaudes. Les orages de fin juin ont été très localisés et le mois de juillet a été le plus sec jamais enregistré. Les floraisons ont eu lieu avec 10 à 15 jours d’avance. A ce stade, les gabarits étaient corrects pour les semis précoces à normaux. Dans leur phase de plus grande sensibilité, les maïs ont souffert du déficit hydrique accentué par la 2nde période de canicule mi-juillet. Les défauts de fertilité observés sont essentiellement liés à des problèmes de fécondation (retard de la floraison femelle, peu de problèmes de stérilité de pollen à priori). Les semis tardifs (après le 10-15 mai) ont été très pénalisés : levée difficile et hétérogène, faible développement végétatif, peu de grains…
Dans les situations les plus critiques, le feuillage s’est desséché dès mi-juillet (stress hydrique et brûlures à cause des fortes températures) et l’évolution de la teneur en MS a été très rapide. Les premiers chantiers d’ensilage ont eu lieu vers le 20 juillet sur des parcelles desséchées et sans grains. A la mi-août, le déficit cumulé P-ETP atteint 120 mm en moyenne (du 10/06 au 15/08). En situations plus favorables (sols profonds, parcelles bénéficiant des orages fin juin), les pluies de la mi-août ont permis un remplissage correct des grains. Les chantiers d’ensilage ont été très étalés, de fin juillet dans le Centre Ouest, l’Est et le Sud-Est, à début octobre dans les régions tardives en bordure maritime Manche.
Le bilan global de l’année est à la baisse, avec une moyenne française estimée autour de 11 t MS/ha, en net retrait par rapport à la moyenne quinquennale (12.5 t). Les rendements, très hétérogènes à l’échelle nationale, sont stables ou en légère baisse dans les régions en bordure maritime Manche mais en forte baisse dans les autres régions (-20 à 30 % dans le Centre-Ouest et Sud-Est par rapport à la moyenne pluriannuelle). Côté qualité, les maïs fourrage sont caractérisés par une moindre teneur en amidon, et une forte proportion de fibres dont la digestibilité est correcte. Au global, la valeur énergétique des maïs fourrage 2022 est assez faible.
Des maïs secs, pauvres en amidon et des fibres moyennement digestibles
Les conditions pédoclimatiques et le stade de récolte sont deux facteurs ayant un impact fort sur la qualité du maïs fourrage. Les températures largement excédentaires au printemps ont été favorables à un développement rapide des maïs jusqu’à la floraison. Ensuite, l’été a été chaud et très sec sur l’ensemble des régions françaises, pénalisant dans de nombreuses situations la fécondation puis le remplissage des grains. Les rendements sont en forte baisse par rapport à 2021 et inférieurs à la moyenne pluriannuelle. Les maïs sont pauvres en grains, la digestibilité des fibres correcte d’où une valeur énergétique assez moyenne.
Six grandes zones ont été définies pour analyser la qualité des maïs fourrages 2022 sur la base de 11 211 échantillons provenant de 26 laboratoires et organismes d’élevage (1) :
- « Centre-Ouest » : Pays de la Loire (sauf Mayenne), Centre-Val de Loire, Deux-Sèvres, Vienne, Haute-Vienne et Creuse.
- « Est » : Seine-et-Marne, Champagne-Ardenne, Lorraine (sauf Vosges), Bourgogne (sauf Saône et Loire) et Bas-Rhin.
- « Nord » : Hauts-de-France et Haute-Nor-mandie.
- « Ouest » : Bretagne, Basse-Normandie et Mayenne.
- « Piémonts-Montagne » : Franche-Comté, Vosges, Haut-Rhin, Saône et Loire, Auvergne, Aveyron, Rhône-Alpes, Pyrénées-Atlantiques et Hautes-Pyrénées.
- « Sud-Ouest » : Charente et Charente-Maritime, Aquitaine (hors Pyrénées-Atlantiques), Midi-Pyrénées (hors Aveyron et Hautes-Pyrénées).
Des teneurs en matière sèche élevées
La teneur en matière sèche (MS) moyenne à la récolte, à 35,0 % MS, est élevée en lien avec une évolution rapide des plantes en fin de cycle et des maïs parfois atypiques (part de grain variable, appareil végétatif desséché). Malgré des dates de récoltes très précoces, 43 % des maïs ont ainsi été récoltés à plus de 35 % MS, et même un quart à plus de 38 % MS. Le quart Nord-Est de la France est particulièrement concerné par ces maïs très secs. Vigilance sur la qualité de conservation : la porosité plus élevée de silos de maïs récoltés trop secs augmente le risque de pertes par une moins bonne conservation et une reprise de fermentation au front d’attaque lors du désilage.
Des maïs assez pauvres en amidon
La teneur moyenne en amidon, à 27,7 % (± 7,7 %) au niveau national, est inférieure de 4 points par rapport à 2021 et l’une des plus faibles observées ces 10 dernières années. Une forte variabilité est observée suivant les régions. Le déficit hydrique couplé aux températures caniculaires pendant la phase de plus grande sensibilité du maïs fourrage a entraîné des défauts de fécondation plus ou moins marqués. Dans les zones les plus favorables ou ayant bénéficié d’orages significatifs fin juin, les pluies de mi-août ont permis d’assurer un remplissage correct des grains. En revanche, dans bon nombre de situations, le retour des pluies à partir de mi-août est intervenu trop tardivement (ou a été insuffisant) pour impacter significativement la production de grains et a seulement permis de réhumecter l’appareil végétatif avant la récolte. Au sein d’un même territoire, de fortes disparités sont aussi observées sur la part de grains des maïs en lien avec la date de semis, la réserve utile du sol, les orages parfois très localisés et la possibilité d’irriguer ou non. Excepté les zones Ouest et Nord en bordure maritime Manche (teneur en amidon « normale », autour de 31 % de la MS) et quelques départements du Sud-Ouest, l’essentiel du territoire est concerné par ce déficit de grains dans les maïs. La région Centre-Ouest est particulièrement impactée avec une teneur en amidon moyenne de 22,6 %. Suivent les régions Est, Piémonts-Montagne et Sud-Ouest avec des teneurs en amidon comprises entre 25 et 27 % de la MS.
Une digestibilité des fibres correcte
La quantité de fibres (NDF) est supérieure à celle de 2021 du fait d’une proportion de tiges-feuilles/grains plus élevée à la récolte. La digestibilité des fibres (dNDF) est correcte cette année, avec une moyenne égale à 51,7 % (± 4,3 %), soit 0,6 point de mieux qu’en 2021. La durée de cycle raccourcie et le stress hydrique subi par les maïs laissaient cependant entrevoir une digestibilité des fibres supérieure, telle qu’observé en 2018, 2019 et 2020.
Les maïs ayant des fibres les plus digestibles se retrouvent dans les régions où les ensilages ont été récoltés précocement ; c’est le cas des maïs des zones Centre-Ouest, Est et Piémonts-Montagne qui présentent respectivement des niveaux de dNDF moyens de 52,8 %, 52,9 % et 52,7 %. La qualité des fibres de ces plantes jeunes a ainsi été préservée de la sénescence accélérée de la fin de cycle. Comme les années précédentes, les ensilages réalisés dans le Nord, l’Ouest et le Sud-Ouest présentent une digestibilité des fibres inférieure à la moyenne nationale à cause d’une durée de cycle plus longue (Nord et Ouest) et une utilisation d’hybrides tardifs plus typés grain (Sud-Ouest).
Une valeur alimentaire assez moyenne
La teneur en matières azotées totales (MAT) des ensilages de maïs est supérieure de 0,7 point à celle obtenue en 2021, avec en moyenne 7,7 % (± 1,1 %). Ces teneurs plus élevées s’expliquent essentiellement par un effet de concentration dû aux faibles rendements. Outre l’effet rendement (facteur explicatif majeur), la qualité d’implantation (enracinement), le niveau de fertilisation et la minéralisation de l’azote du sol, notamment avant la floraison, ont aussi un impact sur la teneur en MAT. La teneur en protéines digestibles dans l’intestin (PDI) est de 62 g/kg MS et la balance protéique du rumen est de -34 g/kg MS. Ces indicateurs calculés sont en légère hausse par rapport à 2021, à cause de la plus forte teneur en protéines brutes des maïs 2022 alors que la teneur en énergie fermentescible est équivalente.
A l’échelle nationale, la teneur en énergie du maïs fourrage, exprimée en UFL (système INRA 2018), est en moyenne de 0.94 UFL/kg MS, équivalente à celle de 2021 bien que le profil de maïs de ces 2 campagnes soit très distinct. La moitié des ensilages de maïs présentent une valeur énergétique inférieure à 0,94 UFL/kg MS, moins adaptés pour des animaux hauts productifs. Ces faibles valeurs énergétiques sont liées à la faible part de grains, non compensée par la digestibilité des fibres et la teneur en sucres solubles. En synthèse, les rendements sont en forte baisse sur une majorité de régions et la qualité du cru de maïs fourrage 2022 n’est pas au rendez-vous.
D’après une communication d’Arvalis