- Par IFCE
Gestion des effluents et santé-sécurité au travail
La gestion du fumier demande souvent beaucoup de temps et engendre de la fatigue physique. Cette situation apporte de l’insatisfaction au travail. Mieux s’organiser permet de gagner en confort de travail et du temps dédié aux autres activités, au contact des équidés ou de la clientèle. Par ailleurs, le confort physique et mental apporté par une meilleure organisation du travail permet d’être plus performant dans son cœur de métier.
Introduction
Des besoins confortés par une enquête de terrain
Un programme d’étude dédié à la gestion et la valorisation du fumier équin - Val’fumier - a été mené de juin 2019 à avril 2021 sur trois territoires pilotes, dont la région Auvergne-Rhône-Alpes. La MSA étant partie prenante de la démarche, une attention particulière a été portée sur les aspects santé et sécurité au travail liés à la gestion du fumier.
Au total, 39 structures équines d’Auvergne-Rhône-Alpes ont été interrogées sur leur organisation du travail. Il en ressort les éléments de synthèse suivants :
- Existence d’une organisation du travail spécifique à la gestion du fumier :
-14 ont une organisation majoritairement manuelle.
- 9 ont un système mécanisé efficace.
- 2 font intervenir des prestataires.
- Et 2 mixent mécanisation et prestation.
- Mise en lumière d’une problématique liée à l’utilisation de litières variées, car cela nécessite d’avoir des organisations du travail différentes.
- Les risques auxquels les structures se sentent exposées sont majoritairement des risques mécaniques, de port de charges, de postures pénibles, et l’exposition aux produits chimiques et à la poussière.
- S’agissant des équipements de protection individuelle (EPI) :
- 27 structures utilisent des chaussures de sécurité.
- Très peu ont recours aux gants et masques, qu’ils jugent souvent inadaptés et donc gênants.
- Enfin, il n’y a pas forcément de réflexe sur l’utilisation de ces EPI.
- Les lieux de stockage sont la plupart du temps bien pensés et se trouvent notamment à proximité des écuries.
- Les moyens pour diminuer la pénibilité les plus cités sont : la mécanisation (l’enquête nationale réalisée en 2019 dans le cadre du programme Val’fumier révèle que 58% des structures répondantes ont un système de curage non mécanisé), l’adaptation des infrastructures, les conseils sur l’organisation du travail, et la sous-traitance.
L’analyse des réponses obtenues a permis d’établir une liste de besoins, comprenant notamment l’amélioration des conditions de travail via :
• L’accompagnement à la mécanisation des structures.
• La recommandation ou la création d’EPI plus pratiques d’utilisation.
• L’apport de conseils, objet de cette fiche technique.
Le bâtiment, outil de travail au cœur de la réflexion
La conception/adaptation d’un bâtiment équin doit être réfléchie pour répondre à plusieurs incontournables :
- Optimiser les temps d’astreinte : diminuer le temps passé à curer les boxes, réduire l’exigence auprès de la main d’œuvre, diminuer la pénibilité.
- Apporter de la sérénité et du confort aux chevaux : avoir un espace de vie qui respecte les besoins fondamentaux des équidés, et ainsi améliorer la relation homme-cheval pour gagner en temps et en sécurité au travail (diminution des risques de coups de pieds, morsures, comportements agressifs…).
- Répondre aux attentes de la clientèle : avoir un bâtiment fonctionnel, une image positive, de bons résultats…
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On distingue deux types d’accompagnement pour répondre au mieux aux problématiques de chaque structure dans le cadre de la gestion des effluents : la prévention primaire et la prévention secondaire, présentées ci-après.
La prévention primaire : analyser le travail
Concilier santé au travail et performances durables
Il s’agit tout d’abord de concilier santé au travail et performances durables dans tout projet de réflexion relatif à l’aménagement de vos écuries. Ainsi, les choix de conception et d’investissement et les principes d’aménagement des situations de travail doivent systématiquement favoriser le bien-être au travail (adapter le travail à l’homme et non l’inverse), la performance et le bien-être des chevaux.
Analyser les situations de travail existantes en étudiant le geste professionnel dans ces 3 dimensions
- Dimension physique : port de charges avec l’évacuation manuelle du fumier, postures contraignantes avec l’utilisation des outils manuels, répétitivité des mouvements…
- Dimension cognitive : modalité de prise et de traitement d’information dans l’environnement professionnel, notamment ici avec l’observation du comportement du cheval lors de l’entrée dans le box (nécessite d’avoir des capacités d’anticipation, d’arbitrage, pour avoir les bonnes réactions).
- Dimension psycho-sociale : prise en compte des valeurs du travailleur, ce qui compte pour lui, ce qui fait sens dans son travail. Par exemple, mécaniser entièrement une écurie pourrait supprimer les efforts physiques, mais supprimerait également le rapport homme-cheval durant cette tâche. Il est aussi important de prendre en compte les capacités de coopération et d’entraide qui peuvent s’instaurer entre les travailleurs pour réaliser les tâches.
Définir les besoins à satisfaire pour concilier santé au travail et performances durables
- Limiter les déplacements humains et équins : chemin central qui dessert les paddocks afin de sortir facilement et rapidement les chevaux, fumière et stockage de paille et du matériel à proximité immédiate des boxes, flux et circuits réfléchis (les chevaux et les engins ne se croisent pas, ce qui évite les accidents)
- Mécaniser les tâches : cela permet de diminuer les ports de charges lourdes, les contraintes gestuelles et posturales, et de gagner en temps et en confort de travail. Plusieurs investissements sont envisageables, notamment :
- Engins de manutention (valet de ferme, mini chargeur, micro-bull…) ? investissement d’environ 11 000 €.
- Brouette électrique et tire-remorque ? investissement d’environ 2 000 €.
- Aspirateur à crottins ? investissement d’environ 3 000 €.
- Système d’aspiration centralisé pour box ? investissement à étudier en fonction du projet (nombre de boxes, création, rénovation…).
- Installation d’une chaîne à fumier ? investissement à étudier en fonction du projet (nombre de boxes, création, rénovation…).
- Installation de parois coulissantes ? investissement à étudier en fonction du projet (nombre de boxes, création, rénovation…).
Les exosquelettes, créés pour soulager physiquement les travailleurs tout en leur permettant de contrôler l’exécution de leurs tâches et de les assister, sont à l’étude auprès des services Santé et Sécurité au Travail de la MSA. Il est nécessaire d’avoir du recul sur cette nouvelle technologie, en prenant en compte l’analyse du travail réel, pour en mesurer les impacts sur la santé.
- Dimensionner correctement les éléments : prévoir un couloir large permet de circuler avec des engins pour la mécanisation des boxes. Cela facilite également la manipulation des chevaux pour les sortir des boxes…
Aménager les situations de travail à partir des besoins exprimés
Les plans doivent être travaillés pour répondre au mieux aux besoins identifiés.
Prendre soin de soi
Il s’agit ensuite, en prévention primaire, de prendre soin de soi avant que les douleurs ne s’installent, car la gestion du fumier peut solliciter fortement l’ensemble du corps.
Le travail peut être l’occasion d’échauffer le cou et le dos, à condition de mobiliser l’ensemble du corps de manière cyclique et progressive, dans une gestuelle globale.
L’activité de curage des boxes peut être exploitée pour l’échauffement de la ceinture scapulaire et des membres supérieurs. Pour ce faire :
- - Augmenter l’amplitude des gestes progressivement.
- - Varier les postures.
- - Alterner les gestes à droite et à gauche.
- - Doser la charge à transporter ou à soulever.
En accentuant l’attention sur une partie de son propre corps, on favorise son échauffement. Lors du curage du box, tout votre corps est en mouvement !
Concrètement, comment peut-on profiter de son activité pour s’échauffer ?
Échauffement lors des déplacements à pieds
Échauffement du cou et du dos pendant les activités
Le dos est un axe central stratégique primordial pour la gestion de l’équilibre. Le cou et le dos sont particulièrement exposés à la fatigue, aux tensions, à l’usure, aux douleurs, aux déformations et aux fractures dues aux chocs.
Échauffement des articulations
- Manier la fourche.
La prévention secondaire : réduire les conséquences des risques
L’objectif est de s’adapter aux structures existantes, en prenant notamment en compte les limites techniques et financières.
Au niveau technique : faire le point sur les équipements, machines, outils utilisés…
Risques liés à l’utilisation d’outils/machines
Accidents les plus marquants
- Coups de fourches dans les pieds => blessures.
- Renversement/écrasement par un engin => décès.
Les situations à risque
- Faire les boxes manuellement avec fourches.
- Présence humaine lors du déstockage de la paille ou de manœuvres.
- Des pistes de prévention
Utiliser le matériel adapté à ses contraintes et à l’environnement de travail (pente, terrain irrégulier…).
• Pas de présence humaine autour du matériel.
• Veiller à ce que la fourche frontale soit abaissée lorsque le tracteur est à l’arrêt.
• Porter des équipements de protection individuelle adaptés en fonction de la tâche.
BON À SAVOIR
- RÉGLEMENTATION -
L’utilisation de chariot élévateur et chargeur frontal nécessite :
• Une autorisation de conduite établie par le chef d’établissement sur la base de trois conditions : un examen d’aptitude médicale réalisé par le médecin du travail, un contrôle des connaissances et des savoir-faire de l’opérateur pour la conduite en sécurité de l’équipement de travail, la connaissance des lieux et des instructions à respecter sur le ou les site(s) d’utilisation.
• Un entretien régulier et une vérification périodique : semestrielle pour le chariot élévateur et annuelle pour le chargeur frontal.
Au niveau organisationnel :
faire le point sur la répartition des tâches, la coordination, l’agencement, l’aménagement des écuries…
Risques liés à l’inhalation de poussières
Accidents les plus marquants
- Développement d’allergies respiratoires.
- Troubles oculaires, irritations, gênes respiratoires.
Les situations à risque
- Manipulation de la paille pour faire les boxes.
- Nettoyage des boxes, remise en suspension dans l’air.
Des pistes de prévention
• Achat de paille de qualité.
• Stockage du foin dans de bonnes conditions, à l’abri des intempéries.
• Port de masques anti-poussières si la ventilation n’est pas suffisante pour limiter l’exposition aux poussières.
Risques liés aux contraintes posturales et gestes répétitifs
Accidents les plus marquants
- Mouvement en se relevant : lumbago.
- Port de charges répétées : hernie discale, douleurs aux épaules…
Les situations à risque
- Faire les boxes manuellement avec fourches (soulever le fumier) et brouettes (conduite jusqu’à la fumière).
- Outils non adaptés à la tâche (manche trop petit, détérioré…).
Des pistes de prévention
• Utilisation de brouettes adaptées ou de brouettes électriques.
• Entretien des portes et des verrous pour faciliter l’ouverture et la fermeture répétée des boxes.
• Diviser la charge en plusieurs petites charges.
• Rapprocher le lieu où l’on transporte la charge.
• Alterner les gestes pour répartir les efforts musculaires et articulaires.
• Préparation physique : échauffement/étirement en début et en fin d’activité.
Au niveau humain :
formation, savoir-faire, compétences
Accidents les plus marquants
- Morsure de cheval.
- Coup de pied.
Les situations à risque
- Faire les boxes en présence du cheval.
- Ne pas être attentif au comportement du cheval.
Conclusion
Les professionnels du secteur équin partagent la même passion, celle de vivre quotidiennement avec les chevaux. Passer du temps auprès d’eux donne du sens au travail. Être en capacité de pouvoir entretenir une bonne condition physique et mentale devient un enjeu de santé pour la structure équine.
Ces éléments visent à encourager les professionnels des entreprises équines à améliorer les conditions de travail dans les écuries, en réfléchissant à l’organisation de la gestion du fumier. Le gain en santé et performance permet d’optimiser le temps passé auprès des chevaux et de la clientèle.
Par Mélanie CONRAUD Ingénieur de projets et développement en territoire IFCE
- Pauline DOLIGEZ Ingénieure de projets & développement « Alimentation et entretien des équidés » IFCE - Services Santé-Sécurité au Travail des MSA de la région Auvergne-Rhône-AlpeSs
Pour en savoir plus
• La MSA vous conseille en matière de prévention des risques spécifiques à la filière équine. Pour aller plus loin, consulter le guide Métiers du cheval : associer travail, santé et performance.
• Accompagnement des services Santé et Sécurité au Travail des MSA de la région Auvergne-Rhône-Alpes dans vos projets d’amélioration des conditions de travail dans vos structures.
Pour être mis en relation avec un conseiller en prévention contacter :
MSA Ardèche Drôme Loire
E-mail : sst_adl.grpint@ardechedromeloire.msa.fr
Téléphone : 04 75 75 68 67
MSA Ain-Rhône
E-mail : sst.blf@ain-rhone.msa.fr
Téléphone : 04 74 45 99 90
MSA Alpes du Nord
E-mail : sst.blf@alpesdunord.msa.fr
Téléphone : 04 79 62 87 71
MSA Auvergne
E-mail : sst.blf@auvergne.msa.fr
Téléphone : 04 73 43 76 54